Mini Critique #17 – Paterson

Dans le nouveau film de Jim Jarmush, Adam Driver incarne avec brio ce grand bonhomme à l’air blasé et à l’âme de poète qu’est Paterson.

Paterson


De : Jim Jarmusch

Durée : 1 h 58 min

Sortie : 21 décembre 2016

Résumé : Avec son nouveau film, Jim Jarmusch va un peu à l’encontre de la quête d’intensité, de frénésie et d’aventure qui semble au cœur des préoccupations actuelles.


Son personnage éponyme Paterson, qui porte le nom de la ville du New Jersey où il habite, est chauffeur de bus. « Juste un chauffeur de bus ». Enfin pas seulement, puisqu’il écrit des poèmes le matin avant de mettre le moteur en marche, le midi entre deux bouchées de sandwich club et le soir dans la cave sombre qui lui fait office de bureau. Que peut-il bien avoir à raconter ?

Des milliers de choses, justement. Il parle des boîtes d’allumettes qui traînent sur la table, du temps qui passe, de toutes les choses qui font son quotidien. Comme l’alchimiste qui transforme le plomb en or, Paterson transforme la banalité de sa vie en une poésie continue. Pour cela, pas besoin de rimes ou d’alexandrins. Il lui suffit d’ouvrir les yeux et les oreilles et de se laisser émerveiller devant ce monde riche en amour, en drames et en paradoxes.

Alors que l’on juge aujourd’hui l’accomplissement d’une vie selon le nombre d’expériences cumulées, Paterson fait exactement l’inverse. Il ne cherche pas à briser son quotidien, à fuir la routine. Au contraire, les actions qu’il répète chaque matin nourrissent son inspiration. Se réveiller aux côtés de sa bien-aimée, avaler son bol de céréales et marcher jusqu’à son lieu de travail, suffisent à rythmer sa vie. En effectuant ces rituels avec automatisme, son esprit est libre de s’évader et d’imaginer des bribes de poèmes, qu’il ressasse avant de les inscrire sur le papier. C’est aussi dans les histoires individuelles qui gravitent autour de lui, depuis sa fiancée artiste jusqu’au vieux barman, qu’il puise son inspiration. Il se positionne en observateur, en analyste discret et muet, pour écouter et comprendre les gens sans émettre de jugement.

Paterson et sa fiancée Laura sont comme le jour et la nuit. Lui est introverti et se nourrit de l’extérieur pour créer, tandis que sa moitié est complètement extravertie et bouillonne de l’intérieur. Elle laisse parler son côté artistique en peignant ses robes et les rideaux, en confectionnant des drôles de cupcakes et en apprenant à jouer de la guitare. Elle ornemente, presque obsessionnellement, tout son environnement de motifs noirs et blancs. Tous deux forment un couple surprenant, mais leur complémentarité les rend indispensables l’un à l’autre.

Donc ?!

Le film de Jim Jarmusch est doux et mélancolique, mais aussi subtilement amusant. Il fait sourire puis tirer la moue, puis sourire à nouveau. Finalement, il inspire de la gratitude envers cette vie et les petites merveilles qu’elle recèle.

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