Les transfigurations de Valerio Adami
Dans la chapelle Saint-Sauveur de Saint Malo, les vieilles pierres côtoient l’art contemporain. Les œuvres exposées sont celles de l’artiste italien Valerio Adami, avec qui le commissaire d’exposition Christophe Penot instaure le dialogue…
Valerio Adami, aujourd’hui octogénaire, est reconnu par les historiens de l’art comme un peintre d’exception. On peut s’extasier devant la technique de ses toiles mais également devant la richesse de leur dimension conceptuelle. La présentation de son travail incite à une réflexion esthétique sur la création, le beau, le but de l’art.
Ses toiles longuement pensées et minutieusement construites n’en restent pas moins imprégnées de sensibilité et de spontanéité…
Sensibilité en ce qui qui concerne les couleurs choisies par l’artiste qui, bien qu’intellectuel, ne se limite pas à la rationalité. Sa palette, savamment organisée dans de grands pots, est aussi riche que les nuances de ses émotions et de ses souvenirs. Ses associations de couleur évoquent pour chacun de nous des images, en faisant appel à notre mémoire et notre sensibilité. La monumentalité de ses toiles contribue à nous plonger dans des ambiances singulières et chargées d’émotion.
Quant à la spontanéité, c’est elle qui fait découler naturellement de la main de l’artiste les lignes de son dessin. Grâce à sa maîtrise technique, Valerio Adami peut laisser évoluer le crayon sur le papier sans se soucier des contraintes. Son esprit, ainsi libéré, fait naître des images étonnantes. Elles sont le produit d’une association d’idées puisées dans l’inconscient et la mémoire de l’artiste.
Ses tableaux et ses dessins expriment souvent une violence guerrière : celle du fascisme, qui a marqué son enfance. Il a pourtant su exploiter cette horreur, puisqu’il en a tiré une insatiable soif d’art, de connaissances et de liberté. Sa culture littéraire et artistique ainsi que ses nombreux voyages viennent enrichir ses compositions avec une grande intelligence. Parmi ses références visuelles et iconographiques, on reconnaît l’enfant foudroyé de la Transfiguration de Raphaël, mais aussi le dieu grec Pan ou encore Colombine, tirée de la Commedia dell’arte. Ses œuvres sont également riches en références du point de vue esthétique. On perçoit notamment l’intérêt de l’artiste pour Picasso
à travers ses visages décomposés et ses personnages aux perspectives multiples. Les lignes noires qui contournent les formes rappellent à la fois le style des bandes-dessinées et la technique des vitraux (avec laquelle il a déjà travaillé par ailleurs). Le résultat est presque surréaliste et invite à la contemplation en même temps qu’à l’analyse.
Valerio Adami, avec son parcours sans faute et sa frénésie créatrice, est une perle rare de l’art contemporain. Il laissera derrière lui des œuvres uniques et des écrits maintenant essentiels aux théoriciens de l’art.
Écrit par Gaëlle Hubert
Exposition « Transfigurations » du 18 juin au 9 octobre 2016
Saint-Malo, chapelle Saint-Sauveur